Cap sur le classique, la prochaine saison chorégraphique 23/24 de l’Opéra de Paris.

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Par Maria Sidelnikova.

Programmée par Aurèlie Dupont, la saison 23/24 a été ajustée par José Martinez, repreneur du flambeau à l’Opéra en décembre dernier, afin « de trouver un équilibre entre la tradition et le contemporain ». En clôture de saison le nouveau directeur de la danse ajoute le Lac de Cygnes de Rudolf Noureev, la compagnie le prépare pour une tournée en février au Japon. C’est forcément l’un des meilleurs moyens de faire face au déficit budgétaire de l’Opéra évoqué par Alexandre Neef, mais pas seulement. L’ex Etoile José Martinez, lui-même élevé sur des ballets classiques de la maison, est persuadé que c’est une excellente occasion pour les danseurs d’affiner leur technique et de grandir. En tout, y compris le Lac, cinq grands ballets seront présentés la saison prochaine, chose inédite depuis plusieurs années. La fin d’année sera valsée sur le rythme de Casse-Noisette de Tchaïkovski. Le conte de fée en vision freudien de Noureev revient pour la première fois sur la scène de l’Opéra depuis 2014. La Fille mal gardée de Fréderic Ashton et Don Quichotte de Noureev s’enchaineront en mars et avril. Giselle sera reprise à nouveau en mai, Myriam Ould-Braham y fera ses adieux.

Quant aux premières mondiales, il n’y en a que deux et elles tiennent dans une seule soirée d’ouverture de saison. Trois femmes, trois continents, trois histoires différentes – la main d’Aurélie Dupont est immédiatement reconnaissable. Marion Motin, danseuse de hip-hop, aperçue dans les clips de Robbie Williams ou de Stromae, fait ses débuts à l’Opéra avec un ballet narratif The last call sur la musique du guitariste et compositeur autodidacte Micka Luna. L’intrigue est un appel téléphonique annonçant la mort d’un être cher. La pièce pour 15 interprètes se développe autour de cette disparition soudaine. La deuxième débutante est la Chinoise Xie Xin, « une première dans l’histoire de l’Opéra », assure Aurélie Dupont. La danse contemporaine en Chine n’a commencé à prendre forme qu’à la fin des années 1980 et Xie Xin en est un membre actif. Horizon est un ballet abstrait, fruit de ses observations sur les levés et couchés du soleil, les regards en haut et en bas, la réalité et illusion. « C’est quelque chose que nous ne pouvons pas distinguer clairement… », explique la chorégraphe. Ça nous rappelle les belles paroles prometteuses de Bobbi Jenn Smith ou d’Alan Lucien Oyen, mais les résultats se sont avérés mitigés. Le trio féminin se clôture par un succès absolu de l’Opéra dont on n’a jamais assez, The Season’s Canon de Crystal Pite.

Les ballets de Jiří Kylián, que l’on croyait oubliés depuis le règne de Brigitte Lefèvre, reviennent sur la scène de l’Opéra. Sechs Tanze (1986) et Petite mort (1991) sur la musique de Mozart – les inséparables chefs-d’œuvre du chorégraphe tchèque seront enfin inscrits au répertoire parisien. La soirée sera complétée par Gods and Dogs (2009) et par la reprise de Stepping stones (1991), sur les musiques de John Cage et Anton Webern. Le choix de Kylián n’est pas un hasard, José Martinez le prenant comme source d’inspiration pour ses futurs projets artistiques. Son cheval de bataille –  commander des ballets contemporains sur pointes aux chorégraphes qui travaillent avec le vocabulaire de la danse classique. Sadeh 21d’Ohad Naarin et Barbe-Bleue de Pina Bausch complèteront le portrait des entrées au répertoire en 23/24. Selon Martinez, les auditions à peine annoncées, il a déjà une liste de quatre-vingt-dix danseurs intéressés. Il ne reste plus qu’à générer le même engouement pour le Lac des Cygnes et Giselle

La politique des compagnies invitées se poursuit en 2023/24. Béjart Ballet Lausanne viendra au Palais Garnier en début janvier, pendant les vacances du ballet. Au programme – Bhakti III, Sept Danses grecques et une troisième pièce de Béjart non-définie pour l’instant, ainsi que Tous les hommes presque toujours s’imaginent de Gil Roman, actuel directeur de BBL. Arrêtés par Aurélie Dupont, les artistes invités reviennent aussi, la reprise commence avec la venue de Marianela Nuñez, principal dancer au Royal Ballet de Londres. Les petits rats de l’École souffleront les cent bougies pour l’anniversaire de Roland Petit avec une programmation pour le spectacle annuel Les Forains. Le Gala des Écoles de danse du XXI siècle, une belle initiative lancée par Élisabeth Platel en 2013, nous donne à nouveau rendez-vous en 2024. Toronto, Amsterdam, Milan, Hambourg, San Francisco, Londres, Copenhague… les forces du ballet mondial se réuniront à Paris en avril. Moscou et Saint Peterbourg, les écoles russes, manqueront cette édition ; le pays prenant le chemin que nous connaissons.